Interview – David Banget, Chief Digital Officer de l’Olympique Lyonnais

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David Banget, Chief Digital Officer de l’Olympique Lyonnais

En devenant propriétaire de son stade avec la construction du Parc OL, l’Olympique Lyonnais a basculé dans un nouveau modèle économique. Un outil qui a déjà permis au club rhodanien d’afficher un chiffre d’affaires record lors de son dernier exercice financier.

Outre son stade moderne, l’OL s’inscrit également comme un club de football connecté à son époque, en phase avec les enjeux et les attentes liées au digital. L’occasion pour nous de partir à la rencontre de David Banget, Chief Digital Officer de l’Olympique Lyonnais.

SportBuzzBusiness.fr : Quel a été votre parcours professionnel avant d’arriver à ce poste de Chief Digital Officer de l’OL ?
David Banget :
Depuis 15 ans, je suis investi au sein de l’écosystème digital. J’ai passé mes 10 premières années en direction technique principalement au sein des groupes AlloCiné, TF1 et PriceMinister à Paris. En 2001, j’ai monté en parallèle mon agence web neobOx et 10 ans plus tard, j’ai décidé de me lancer pleinement au sein de l’écosystème des startups numériques à Paris en créant myGloo, le « La Fourchette des bars » après une première levée de fonds, désormais gérée par une agence. J’ai également créé une société d’accompagnement de startups, Tweekup, qui m’a ainsi permis d’en accompagner une vingtaine et d’investir financièrement au sein d’une dizaine d’entre elles principalement sur Paris, Lyon et Grenoble.

En 2013, nous avons décidé en famille de s’installer sur Lyon pour une meilleure qualité de vie. J’ai ainsi continué d’accompagner des startups et me suis impliqué au sein de l’écosystème numérique local : mentoring au sein de l’incubateur Boost In Lyon, accompagnement de startups au sein de l’espace de co-working La Cordée et beaucoup de rencontres d’acteurs du Digital dans le secteur privé. Des discussions en 2014 ont été entamées avec l’OL pour finalement rejoindre le comité de direction en juin 2015 en charge du Digital au niveau Groupe.

Ma mission est une synthèse parfaite de mon parcours : une expertise digitale à mi-chemin entre le business/marketing et la technique, une vraie dynamique intrapreneuriale, un investissement au sein de l’écosystème numérique à l’international et un vrai challenge organisationnel et de conduite du changement. La notoriété de la marque et un Président visionnaire ont fait également partie du charme du poste.

« Sur les réseaux sociaux nous sommes garants du bon équilibre entre 3 types de messages : le sportif, l’autopromotion et les messages de nos partenaires. »

SBB : Vous aimez le sport mais vous n’aviez jamais travaillé dans ce milieu. Cela a-t-il posé problème lors de votre recrutement ?
DB :
C’est évidemment une question que je me suis posée en rencontrant la Direction Générale et le Président. Très vite, j’ai compris qu’ils recherchaient avant tout une expertise métier.
Ce que je trouve très intéressant au sein de l’Olympique Lyonnais, c’est que la stratégie est dictée par un savant mélange d’intuitions de personnalités avec une grande expérience dans le milieu sportif, et d’analyses très pragmatiques pilotées par les chiffres qui font le succès du Groupe !
Toutes les équipes en interne ne sont pas forcément des férues de foot, mais en revanche le dénominateur commun est bien souvent la passion du sport. L’expertise marketing / business foot et plus largement « Entertainment » est de toute façon très présente au sein du pôle Marketing et au sein des équipes du Stadium Manager.

SBB : Qu’englobe le terme « digital » dans un club de football professionnel ?
DB :
Je pourrais en parler pendant des heures ! (rires) Tout d’abord, je dirais que le périmètre ne se cantonne pas au club de foot car on parle désormais du Groupe Olympique Lyonnais qui englobe toutes les activités autour du Club et du Parc OL avec une diversification des activités au-delà du foot (hockey, concerts, rugby,…), et une expérience inédite venant enrichir sa venue au stade avec d’ici 2018, l’ouverture d’un musée, d’un centre de loisir, d’immeubles de bureaux, d’un centre médical du sport… Un vrai lieu de vie ouvert 365 jours par an, ayant déjà accueilli au sein de nos salons / loges hors événements plus de 150 séminaires ! Le business model du Parc OL repose de plus en plus autour du B2B.

Depuis juin 2015, mon rôle est de structurer (casser les silos), d’accélérer la stratégie digitale du Groupe et – dans un premier temps – de livrer la promesse « connectée » du nouveau stade.

Plusieurs personnes du pôle Marketing et Merchandising ont constitué l’équipe de départ du pôle Digital et nous avons recruté plusieurs experts constituant dorénavant nos 3 pôles :

– Un pôle « Digital Communication » constitué de 7 personnes (Responsable Digital Communication, Chef de projet Marketing Digital, Graphiste, Intégrateur HTML, Traffic Manager, Community Manager, Community Manager International) permettant de gagner en notoriété et de générer du business autour de nos différentes offres merchandising et billetterie principalement (acquisition de trafic et push marketing). Il s’agit également d’animer la communauté représentée par plus de 5 millions de fans sur les réseaux sociaux

– Un pôle « Digital Fan Experience » constitué de 3 personnes (Responsable Digital Fan Experience, Chef de Projet Digital, Assistant Chef de Projet Digital) pilotant nos différents prestataires externes de développement permettant la mise en place et les mises à jour de nos plateformes web et mobile représentant plus de 20 millions de visites par an.

– Un pôle « Data CRM » constitué de 4 personnes (Responsable Data CRM, Chef de Projet CRM, Data Marketing Analyst, Data Quality Manager) pilotant l’ensemble des projets CRM du Groupe et étant garant de la collecte, qualification de l’ensemble des données collectées pour ensuite les analyser et en ressortir de nouvelles stratégies commerciales & marketing. Un des objectifs phares de la saison est d’automatiser nos messages, de gérer la « pression marketing », de segmenter et de définir des scenarii de push.

SBB : Concernant le pôle communication, cela signifie que vous avez séparé la communication digitale du groupe des autres formes de communication ?
DB :
Non, en fait, nous travaillons main dans la main. Si nous portons le leadership Groupe autour des 2 pôles Data CRM & Digital Fan Experience, au sein du pôle « Digital Communication » nous sommes en partie en support du pôle Marketing et Communication pour décliner leurs messages sur le canal digital. Nous apportons notre savoir-faire autour des leviers digitaux innovants de communication (retargetting, RTB, pré-roll, social ads, display…).

Sur les réseaux sociaux nous sommes garants du bon équilibre entre 3 types de messages : le sportif, l’autopromotion et les messages de nos partenaires. C’est ce qui nous permet d’avoir un des meilleurs taux d’engagement de nos fans au niveau des clubs européens.

« Un challenge à la hauteur des ambitions de notre Président. »

SBB : Tous vos objectifs en termes d’expérience digitale liés à l’ouverture du Parc OL se sont-ils réalisés ? Quelles innovations pouvez-vous encore proposer ?
DB :
Oui, nous avons déployé toute notre énergie en fin d’année dernière pour répondre à la promesse du stade « connecté » lors du lancement au 9 janvier 2016 et la promesse était très riche : un stade cashless avec une carte de fidélité / paiement RFID, 350 écrans IPTV et 2 écrans géants à animer les soirs de matchs, une expérience optimisée au sein de nos 300 points de ventes buvettes / merchandising, la mise à jour de nos différents supports web et mobile incluant les nouvelles offres du Parc OL et une application mobile dédiée à l’expérience « soir de matchs » offrant : la dématérialisation de ses billets, découverte du stade, calcul d’itinéraire, achat de billets, consultation des événements, statistiques en temps réel, social wall, commande à la place, chaines vidéos live et replay VOD multicam avec choix de son angle de caméra… Un challenge à la hauteur des ambitions de notre Président.

Tout cela grâce évidemment à une infrastructure robuste composée entre autres de 166 contrôles d’accès et de 650 bornes wifi pouvant accueillir 20 000 connexions simultanées complétées par une couverture totale cellulaire.

Après avoir lancé la commande à la place via l’application mobile Parc OL et un retrait en caisse prioritaire, nous sommes en test depuis plusieurs matchs autour de la livraison directement à sa place.

Des idées pour la suite, ce n’est pas ce qui manque ! Je ne peux pas tout dévoiler mais l’application mobile va évoluer, notre billetterie va être optimisée et nous allons travailler également l’expérience B2B et la partie gamification au sein du stade. Nous regardons également de très près les technologies beacons pour enrichir l’expérience spectateurs.

SBB : Jean-Michel Aulas décrivait il y a un an la stratégie digitale de l’OL comme ambitieuse et comparable à celle des grands clubs. Quels ont été vos modèles et références ?
DB :
Nos modèles ne venaient pas forcément de clubs français mais plutôt de grands clubs anglais, espagnols ou allemands, de clubs propriétaires de leur stade et de l’enrichissement de l’expérience spectateurs dans le sport US.

Au sein des équipes du Stadium Manager, il y a également une veille permanente de ce qui se fait de mieux à travers le monde et notre DSI assure une veille Infrastructure de pointe. Sur ces sujets, nous avons de bonnes relations avec les autres grands clubs européens et nous échangeons de temps en temps sur les bonnes pratiques.

En marge, nous sommes très impliqués au sein de l’écosystème des startups européennes innovantes autour du sport qui peuvent répondre à notre vision de l’expérience stade de demain et nous sommes très bien accompagnés par des partenaires majeurs technologiques.

« La marque forte du Groupe restera le club de foot OL et nous devons continuer à capitaliser sur les valeurs fortes du club. »

SBB : Le digital est-il un des leviers principaux pour « décorréler » les résultats sportifs et financiers ? Cet objectif est-il réalisable ?
DB :
Le business model du Parc OL se détache progressivement du résultat sportif justement via les différents services qui se lancent d’ici 2018 autour du stade et surtout de la vie 365 jours par an proposée à nos clients B2C et surtout B2B. Ceci étant, la marque forte du Groupe restera le club de foot OL et nous devons continuer à capitaliser sur les valeurs fortes du club.

Le Digital va permettre notamment de mieux connaître la typologie de nos spectateurs, de nos clients et d’ajuster en conséquence nos services et nos produits.

SBB : Où en est le dossier du Naming du Parc OL ?
DB : Ce n’est pas à moi de répondre, tout ce que je peux dire, c’est que le sujet avance bien.

SBB : Grâce à vos outils et données (par exemple 70% du CA de la billetterie est réalisé en ligne), parvenez-vous à identifier un profil type du supporter lyonnais ?
DB :
Oui nous apprenons de plus en plus sur la typologie et le comportement de nos supporters. Nous venons de dépasser les 20 000 abonnés mais n’avons pas la vocation de remplir le stade au ¾ d’abonnés comme peut le faire le PSG. Nous préférons maîtriser notre politique tarifaire en places sèches, attirer de nouveaux publics en diversifiant nos événements (enfants, femmes, famille…) Nous souhaitons également mettre en avant la sécurité du Parc OL pour rassurer et attirer de nouveaux spectateurs.

SBB : La communauté de supporters lyonnais est très présente sur les réseaux sociaux et notamment sur Twitter. La sévérité de certains est-elle difficile à gérer ?
DB :
Effectivement il y a les aficionados, les ultras fans de l’OL bien souvent très au courant de tout ce qui passe dans la vie du club. C’est plutôt très positif !
Nous sommes très à l’écoute de ce qui se dit sur les réseaux sociaux et nous avons équipé le service client d’un outil d’écoute permettant de répondre à la majorité des demandes entrantes sur Facebook et Twitter.
L’avantage de ce type de support, c’est le lien direct avec le fan, sans intermédiaire, donc même au sein de certains propos sévères, il faut savoir faire la part des choses et prendre les bonnes remarques pour ensuite améliorer nos services.

« Jean-Michel Aulas est capable dans une même réunion de passer d’un sujet hautement stratégique à un sujet d’activation digitale sur les réseaux sociaux. »

SBB : Parfois, vous n’aimeriez pas une communication un peu plus « soft » de Jean-Michel Aulas sur Twitter ?
DB :
Je peux être amené à interagir avec lui sur certains messages à poster, certaines communications via Twitter. Son parcours, ce qu’il apporte au club depuis 30 ans et son objectif permanent de protéger les valeurs du club et de préserver le staff pro et les joueurs le rendent plus que légitime sur ses axes de communication. Son nombre d’abonnés a explosé pour atteindre les 330 000 abonnés, quasiment autant que notre joueur international phare, Alexandre Lacazette ! Il est devenu une célébrité à suivre sur Twitter et parle franchement sans filtre et tabou et c’est ce qui plait aux journalistes et aux fans. Ce lien direct avec les fans lui permet de couper court à toutes fausses déclarations ou messages erronés provenant principalement de la presse.

SBB : Le président connecté et fondateur d’une grande entreprise informatique vous laisse-t-il une grande autonomie ou s’implique-t-il dans le processus décisionnel dans votre domaine ?
DB :
C’est un Président hyper connecté, très impliqué dans l’opérationnel et qui connaît très bien tous les dossiers en cours. Il est très souvent moteur de mises en relation et de retours d’expérience constructifs autour de CEGID. Il est capable dans une même réunion de passer d’un sujet hautement stratégique à un sujet d’activation digitale sur les réseaux sociaux. Il peut s’impliquer aussi dans des RDV clés de nouveaux partenariats technologiques. Il est très tourné vers le monde des startups du numérique et toutes innovations permettant d’enrichir l’expérience du spectateur.
J’ai l’impression d’être entendu, d’être guidé par une vision stratégique tout en ayant une latitude de mouvement dans le quotidien.

Nous participons également ensemble régulièrement à des tables rondes autour des réseaux sociaux ou d’innovations digitales dans le sport, participons à des concours de startups en tant que jurys ou bien encore à des meetings de partenaires technologiques.

SBB : L’OL a mené une campagne de recrutement sur Linkedin dans le digital. Pour les étudiants qui nous lisent ainsi que les professionnels en recherche, pouvez-vous nous dire les qualités principales à avoir pour travailler dans le département digital d’un grand club de football professionnel ?
DB :
Nous recrutons régulièrement des profils stagiaires pour rejoindre notre pôle Digital Communication et recrutons encore quelques profils en CDI. Nous recherchons avant tout des experts ayant une double compétence marketing-business et technique. Si vous êtes passionné par le Sport, votre intégration sera d’autant plus facile !

En vidéo : PARC OL : Un stade connecté pour mieux communiquer

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